Ce soir je vais dormir à San Francisco.
En ce moment même je suis allongée sur le lit de la chambre d’hôtel où je viens de poser mon sac. Par la fenêtre je vois le bâtiment d’en face, également pas très haut, jaune, avec un toit en tuiles rouges. Ce n’est pas courant. J’entends les bruits de la rue.
Et dire que je vais dormir à San Francisco.
Juste une nuit, cette fois-ci. Demain je prendrai un car pour rejoindre une ferme du côté de Petaluma, un peu plus au nord. J’y passerai deux semaines, pour ensuite revenir à San Francisco où je passerai également deux semaines dans un appartement en m’occupant d’un chat. Normalement. J’ai rendez-vous ce soir avec la propriétaire et aurai alors confirmation qu’elle m’accepte, ou pas.
Donc, a priori, je passerai la fin d’année ici, et j’en suis vraiment ravie.
Aujourd’hui c’est juste un prise de contact.
Mais n’empêche, je vais dormir à San Francisco.
Rue de Brooklyn
Il y aura bientôt trois ans, quand je commençais à penser qu’il serait possible que je passe la main et vende la ferme, la question de quoi faire ensuite venait très vite. Et la réponse qui venait très vite aussi était j’irai voir San Francisco et la Californie. Ne me demandez pas pourquoi, je n’en sais rien. C’était même plutôt incongru. Quand on est maraîchère bio, qui plus est à Nature et Progrès, on est dans des réseaux où San Francisco ou du moins la Californie n’a pas une bonne image. Les Etats Unis, la Californie, ça fait superficiel, consumériste, débile.
Et pourtant, j’avais cette profonde envie d’aller voir la Californie et San Francisco. Même si raisonnablement l’Amérique du sud est beaucoup plus tendance dans les réseaux de gauche bio et alternatifs.
Oui, mais la raison parfois, et même de plus en plus, je m’en balance. Et je dois dire que la notion de gauche bio alternatifs aussi, maintenant. Parce que ce n’est pas un milieu toujours très sain.
Une rue de New York
Bref, me voilà à San Francisco. Presque trois ans après l’apparition de l’envie de venir ici. J’y suis.
Pour arriver là ça n’a pas été direct. Les précédents articles du blog relatent le début du voyage.
Et après San Francisco je continuerai la route.
Ceci dit, ça fait un mois et demi que je vadrouille aux Etats Unis et je n’ai toujours rien raconté. Simplement mis quelques nouvelles quotidiennes sur Instagram et Facebook. Je ne sais pas pourquoi je n’écris pas plus. Il y a des fois où je ne peux pas. Et plein de fois ou je n’y pense pas. Certaines fois j’ai la flemme. Souvent je n’ai pas l’inspiration.
J’en étais donc à mon départ des Canaries, destination New York.
Ca fait loin dites donc.
Je me souviens que je m’en faisais tout un monde d’aller à New York. Une expérience extraordinaire, juste un peu moins extraordinaire que d’aller dans l’espace.
Et puis les Etats Unis, ça me faisait un peu peur, bien programmée par tout ce qu’on en dit.
Mais ça me faisait envie.
Rue de New York
Et puis je n’étais pas très bien. Fatiguée, en mes-estime de soi, en quête de sens. Je sortais d’environnements pas épanouissant et surtout il y avait un grand zapping dans le programme. J’avais abandonné la transatlantique qui aurait dû me faire débarquer à la Martinique vers le 20 novembre. Je devais rester dans les Caraïbes jusqu’en février-mars avant de rejoindre les Etats-Unis.
Pendant tout le début de mon voyage en Europe il y avait toujours en objectif Gibraltar pour prendre le bateau puis la traversée.
Là, on n’était que le 13 octobre et j’étais déjà aux Etats-Unis sans rien devant moi.
Enfin.
Oui, maiaiais, eueueuhh, je fais quoi maintenant ?
Encore plus de qui suis-je ? Ou vais-je ? Dans quel état j’erre ?
Les états d’Amérique, sister.
Tes états d’âme Eric, comme disait la chanson. Eric est le nom qu’on avait prévu pour moi à la naissance, donc ça me parle.
Bâtiments new-yorkais
New York a été fabuleuse pour m’accueillir avec tout ça.
Je logeais dans le sud de Manhattan, downtown comme on dit. Avec les quartiers de East Village, West Village, Soho, Chinatown, Little Italy. Tout en bas il y a Wall Street, qui porte bien son nom tellement on a l’impression d’être emmuré quand on se balade dans les petites rues séparant des grattes-ciel.
C’était très agréable de marcher dans New-York.
Je me souviens du premier jour, avec du brouillard dans la tête et plein d’erreurs qui me faisaient perdre de l’argent (mauvais choix de taxi à l’aéroport, perte de mon porte-monnaie, et puis je ne sais plus quoi). Après avoir réglé quelques formalités (acheter des oranges, une carte SIM américaine, un adaptateur de prise électrique et eu une conversation Skype avec un couple du Colorado) j’avais envie de retourner sous la couette et m’oublier dans le sommeil.
Grattes-ciel de middle town
Mais une autre moi à l’intérieur m’a secouée en disant, oh ! Ça va pas non ? Bouge, marche ! Et j’ai marché. Objectif Central Park, dans la partie nord. Au début je n’étais pas motivée, je laissais trainer mes yeux par-ci par-là. Je prenais des photos. Et puis voir l’Empire State building m’a allumé un petit sourire joyeux, de la joie spontanée de l’enfant qui s’amuse. La marche me nettoyait du brouillard.
Un peu avant d’arriver à Central Park je me suis acheté un grand thé vert, que j’ai siroté assise sur un grand rocher à l’entrée du Parc. La nuit commençait à tomber mais je me suis quand même avancée dans le parc. Il y avait plein de monde. Une immense pelouse était bien occupée par des groupes différents. Des familles ou des groupes d’amis qui pique-niquaient. Des vieux hippies qui jouaient de la guitare. Des gens qui jouaient au frisbie ou autres jeux de raquettes. Des individus qui lisaient. Des ami.e.s qui discutaient. De tout. En fait la nuit tombait mais ça ne dérangeait personne. Moi qui croyais qu’il ne fallait pas mettre les pieds à Central Park la nuit et bien j’avais tout faux. Peut-être parce qu’on était samedi ?
Pelouse de Central Park
Danseurs sur rollers à Central Park
Dans les allées il y avait des musiciens, de tous les styles. J’ai aussi vu un club de danse sur roller dont le DJ passait les derniers morceaux pendant que les derniers danseurs s’éclataient dans l’espace désigné pour piste.
Près d’une fontaine il y avait des chinois qui faisaient des massages du dos à 10 dollars. J’ai pris. J’ai eu mal à un point en bas du dos pendant plusieurs semaines. Je déconseille les massages de rue.
Musiciens dans une allée de Central Park
En fait j’étais super bien. La marche, la présence des arbres, cette pseudo Nature de Central Park, les gens heureux à jouer, courir, faire du vélo, discuter, etc. J’étais émerveillée et heureuse de ce que je voyais. Du coup je ne voulais pas que le film finisse.
J’ai continué toujours au hasard, suis sortie du parc et ais pris une autre grande rue pour redescendre vers downtown. C’était Broadway. Là, grande surprise en me retrouvant à Times Square. Lieu où les bâtiments sont couverts d’immenses panneaux publicitaires lumineux, qui éclaboussent les couleurs et les megawatts sur une foule cosmopolite de touristes époustouflés derrière leurs caméras et appareils photo.
Grattes-ciel la nuit
Times Square
Times Square
Gradins pour public à Times Square
C’était incroyable, j’étais non seulement dans l’espace mais sur une autre planète. Il y a pas mal de films de science fiction où les villes sont figurées ainsi, en pire peut-être, avec plusieurs étages de circulation de véhicules volant.
Oui, incroyable. Je ne connais pas l’histoire de ce lieu, mais à part époustoufler je ne sais pas à quoi il sert.
Plein la g—– j’ai eu.
Ce soir là j’ai continué à marcher vers ma chambre, j’ai acheté un plat indien à un marchant de rue, j’ai mangé dans un petit parc en regardant la vie autour de moi, et puis je suis rentrée à ma chambre Airbnb.
Rue de New-York la nuit
J’étais remontée. Recentrée, j’avais à nouveau les pieds dans mes godasses.
Pendant 4 jours j’ai marché à travers la ville, avec des crochets à Harlem et à Brooklyn.
Le matin je me faisais une pause café déca dans un Starbuck et l’après-midi une pause thé vert, dans un autre Starbuck. Je suis sensée boycotter les Starbucks, parce que cette grosse boîte fait de l’évasion fiscale à outrance. C’était les premières fois que j’entrais dans des Starbucks, sous les conseils d’une amie américaine vivant au Conquet me disant que là on peut s’assoir longtemps, boire un bon café, avoir la WIFI gratuit et faire pipi. Et bien c’est presque vrai.
Autres piétons marchant à New-York
Les Starbucks font un déca vraiment bon (je ne peux pas boire de vrai café, sauf si je veux faire nuit blanche) et un thé vert fabuleux (bio, en plus). Meilleurs que n’importe quel café ou thé bu dans un café français. Et pouvoir se poser dans ces endroits agréables et confortables quand on est visiteur à l’étranger c’est bien pratique. Du coup j’ai visité plein de Starbucks, et j’ai ainsi pu écrire mon précédent article. Par contre, dans quatre Starbucks sur cinq les toilettes étaient réservées uniquement au personnel, impossible de faire pipi ! Argh. Je pense que ces endroits en avaient marre de voir des queues de pisseuses.
Ceci dit, maintenant que j’ai replacé New York et les Etats Unis sur Terre, et que j’ai été dans d’autres cafés que des Starbucks, et qui étaient aussi sympas et bons, je vais pouvoir me remettre plus sérieusement à mon boycott. Parce que râler ça ne sert à rien ; si on n’achète pas, ça ne marche pas. C’est nous qui choisissons ce qui existe ou pas.
China Town de New-York
A New-York j’ai également envoyé des messages pour trouver des points de chute. Mon entretien Skype avec un couple du Colorado m’a permis d’être acceptée comme house sitter à Boulder, du 4 au 19 novembre. Que faire d’ici là…
Mon amie Marion m’a proposée de rencontrer son frère qui vivait avec sa famille à Washington DC (DC c’est pour préciser qu’il s’agit de la ville de Washington, sur la côte est, et non pas de l’état de Washington, au nord de la côte ouest). J’avais aussi très envie de voir la Nouvelle Orléans.
Ca s’est bien agencé au final. J’ai eu une place d’une semaine de Workaway à la Nouvelle Orléans et sur la route je pouvais m’arrêter à Washington DC.
Pâtisserie dans Wall Street, s’appelant Le Financier
J’ai réservé mes places de bus, heureuse de ressentir à nouveau cette envie de bouger, de traverser et découvrir de nouveaux espaces. Juste pour le plaisir de. En écoutant à l’intérieur, le son plus en plus fort de mes tripes à la place de celui des méninges.
J’ai quitté New York un matin, avec un déca Starbuck à la main.
Immeubles de Wall Street
Rue de Wall Street
Un petit parc sympa, de jour
Parc sympa, de nuit
Rue la nuit, en première ligne des taxis ; il y en a plein à New York
Ma pomme au milieu de Times Square